Dans le cadre d’un héritage de biens immobiliers et mobiliers, est-il plus intéressant de faire un apport préalable du patrimoine à une société dont on ferait ensuite donation à ses héritiers ou de réaliser une donation de personne physique à personne physique?

Quels sont les avantages, inconvénients et coûts de chacune des formules?


Il n’existe pas de réponse unique. Chaque situation doit être examinée au cas par cas pour déterminer la solution la plus adéquate compte tenu des objectifs poursuivis, de la composition du patrimoine, de la localisation des personnes concernées, répondent Jeanine Windey et Aurélie Naud, respectivement Avocate Associée et avocate au cabinet Buyle Legal.

Une donation en règle doit être faite par acte authentique, ce qui suppose un passage chez le notaire et entraîne obligatoirement le payement de droits de donation.

 → Bon à savoir: Si vous faites une donation, des droits de donation seront dus.

Le montant de cette taxe dépendra d’un certain nombre d’éléments.

Il est néanmoins possible de faire une donation manuelle (bijoux, argent, tableau) ou une donation indirecte (virement bancaire sans communication) sans passer par la case notaire. Dans ce cas, il est toutefois conseillé de prévoir un écrit pour prouver l’existence de la donation, sa date et pour en définir les modalités éventuelles (charge, réserve d’usufruit…)

 

Patrimoine mobilier


Si votre patrimoine est composé de biens mobiliers, il est possible de donner de personne physique à personne physique à des taux fixes qui varient de 3 à 7% en fonction des Régions et du lien entre le donateur et le donataire. Ils peuvent même être réduits à zéro si l’acte est reçu par un notaire étranger.


Le passage par une société "simple" peut toutefois être indiqué en fonction des objectifs poursuivis. Cette structure permet en effet de transmettre un patrimoine sans application des droits de succession tout en conservant la gestion des biens transmis.


L’apport de biens mobiliers à une société "simple", vous permet de constituer une indivision sans droits d’enregistrement. Vous pourrez ensuite faire donation de la quasi-totalité de vos parts à vos héritiers, moyennant l’acquittement de droits d’enregistrement à des taux réduits, voire sans aucune taxation. Vous pourrez également modaliser cette donation, par exemple en vous en réservant l’usufruit si vous souhaitez continuer à percevoir les revenus de vos avoirs et le droit de vote attaché aux parts données. À votre décès, vos héritiers étant déjà (nu-) propriétaires des parts de la société, aucun droit de succession ne sera dû. Enfin, la répartition du patrimoine en cas de liquidation de la société est également exemptée de droits de mutation si celle-ci ne compte que des biens mobiliers.


La société "simple" est en outre peu contraignante: vous ne devez pas nécessairement passer devant notaire, aucun capital social minimum n’est requis et ses règles de fonctionnement peuvent être librement déterminées dans les statuts.


Vous pouvez conserver la gestion des biens apportés à la société en vous faisant désigner gérant statutaire à vie (dont le mandat ne sera révocable que pour motifs graves). Vous aurez dès lors un droit de veto sur toutes les décisions à prendre, même si vous avez fait donation de vos parts à vos héritiers.


A priori, le passage par une société dotée de la personnalité juridique pour y loger un patrimoine mobilier présente moins d’intérêt.


Patrimoine immobilier


Si votre patrimoine est immobilier, une donation de personne physique à personne physique est aussi possible. Mais dans ce cas, les taux dépendent de la valeur du bien donné et du lien entre le donateur et le donataire. Il faut donc parfois envisager de fractionner la donation pour bénéficier des tranches de taxation plus favorables.


Une mise en société peut également être envisagée. Mais le recours à la société "simple" n’est pas conseillé. En effet, l’apport d’un bien immeuble à une société est taxé en droits d’enregistrement (12,5% en Wallonie et à Bruxelles, 10% en Flandre). Et une donation de parts d’une société "simple" est considérée comme une donation de ce qui est représenté au travers desdites parts. Dès lors, si la société comprend des immeubles situés en Belgique, la donation des parts de la société sera obligatoirement enregistrable, même si elle a été reçue à l’étranger, et elle sera taxée aux taux progressifs par tranche. Enfin, en cas de liquidation de la société, la répartition du patrimoine (sortie d’indivision) sera soumise à un droit de mutation – certes réduit – de 1 à 2,5% en fonction des Régions.


Le recours à une société dotée de la personnalité juridique permet d’éviter l’écueil de la taxation "par transparence" en présence d’immeubles dans la société. Mais la formule présente d’autres inconvénients: l’apport d’immeuble taxé à 10 ou 12,5%, des règles de constitution et gestion plus lourdes, la taxation de la société à l’ISOC, des frottements fiscaux en cas de liquidation de la société (taxation de la plus-value), etc.