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De très nombreux couples modifient leur contrat de mariage ou optent carrément pour un autre régime matrimonial en cours de route lorsqu’ils (re)découvrent les implications de leur choix initial.

Quelles sont les options qui s'offrent à eux?


Si de nombreux couples règlent les modalités de leur union par contrat avant de se marier, d’autres ne prévoient rien. Il arrive souvent que plus tard, ce (non)-choix se révèle inadapté à leurs souhaits et besoins. Heureusement il est possible de modifier son contrat de mariage ou de changer carrément de régime matrimonial. C’est même très fréquent. Chaque année, les notaires recensent d’ailleurs bien davantage de contrats modificatifs que de nouveaux contrats de mariage. Pourquoi?


Le contexte

En 2018, 33.898 contrats de mariage et actes modificatifs ont été inscrits au Registre central des contrats de mariage (CHR, base de données centrale qui reprend les contrats de mariage, les actes modificatifs ainsi que les contrats de cohabitation), selon le dernier baromètre "Famille" publié ce jeudi matin par la Fédération du notariat. C’est un peu moins qu’en 2017 (-4,8%).


Le nombre de nouveaux contrats de mariage, relativement stable (13.165, soit -0,6% par rapport à 2017), ne représentait que 38,8% du total.

70%

Parmi les couples qui choisissent un régime matrimonial spécifique avant de se marier, 70% optent pour le régime de séparation de biens.

 

Les couples sont en effet très nombreux à modifier leur contrat de mariage en cours de route ou à changer carrément de régime matrimonial. En 2018, ces actes modificatifs représentaient 61,2% des inscriptions au CHR!

 


Les différents scénarios


Le pic des contrats de mariage est enregistré parmi les -35 ans. Certains partenaires signent un contrat avant de se marier et optent alors délibérément pour un régime déterminé. Ils ont dans ce cas la possibilité d’ajouter des dispositions ou des dérogations du régime matrimonial choisi, en fonction de leur situation personnelle et pour obtenir du sur-mesure.


Les couples qui choisissent un régime spécifique avant de se marier optent en grande majorité (70%) pour la séparation de biens. 10% choisissent le régime légal, 18,9% la communauté conventionnelle, et 1,3% la communauté universelle.


Même s’ils n’en sont souvent pas conscients, les couples qui se marient sans contrat de mariage, que ce soit par "facilité" ou parce qu'ils estiment que ce n'est pas nécessaire, sont bel et bien soumis à des règles prédéterminées puisqu’à défaut de contrat, c’est le régime légal qui s’applique automatiquement aux futurs époux. Ce n’est évidemment pas sans implications ni conséquences.


Enfin, de nombreux couples se contentent de signer une déclaration de cohabitation légale à la commune, mais la quasi-totalité d’entre eux font l’économie d’un contrat de cohabitation devant notaire "malgré l’intérêt de fixer des dispositions dans un tel contrat et la sécurité que cela apporte", selon le communiqué de Fednot. En 2018, un peu moins de 300 contrats de ce type ont été conclus.


Les implications


La vie se charge pourtant souvent de rappeler aux couples l’intérêt, voire la nécessité, de se pencher sérieusement sur les modalités de leur union et d’opter pour le régime qui leur correspond le mieux.
Les statistiques sont éclairantes à cet égard.


De trop nombreux couples ignorent en effet les implications du mode de conjugalité ou du régime matrimonial pour lequel ils ont opté, notamment au niveau de protection qu’il offre en cas de mauvais scénario comme un divorce ou un décès.


Heureusement, il est possible de corriger le tir en cours de route! "Les gens pensent souvent qu’il ne peuvent établir de contrat de mariage qu’avant leur union. Or, ils peuvent aussi le faire alors qu’ils sont déjà mariés. Ils ont également la possibilité de modifier le contrat existant ou de changer de régime matrimonial", souligne le notaire Martoye.

"Les gens pensent souvent qu’il ne peuvent établir de contrat de mariage qu’avant leur union. Or, ils peuvent aussi le faire alors qu’ils sont déjà mariés." Jean Martoye - notaire 

 


Et que constate-t-on? Qu’environ la moitié (47,1%) des couples qui revoient leur contrat a opté pour un autre régime matrimonial, tandis que l’autre moitié (52,9%) a effectué quelques modifications.


Mais le plus frappant, c’est que ce sont les couples mariés sous le régime légal, et donc également les couples mariés sans contrat de mariage, qui sont le plus fréquemment amenés à rectifier le tir. L’année dernière, 70,7% de ces couples ont changé de régime matrimonial! Quasi tous (92,4%) sont passés en communauté universelle, tandis que seuls 6% ont choisi la séparation de biens et 1,6% la communauté universelle.

 

Les modifications apportées

L’autre tendance de fond, c’est que la modification du contrat de mariage et le changement de régime matrimonial connaissent un pic aux alentours de 55-65 ans. Plus de 75% des époux qui modifient leur contrat de mariage ont plus de 50 ans et plus de la moitié des modifications de contrat est à mettre à l’actif des plus de 60 ans.


"À cet âge-là, on intègre plus facilement la possibilité d’un décès, on a une image plus claire de sa situation familiale et de la façon dont on souhaite régler les choses", explique le notaire Jean Martroye. Et une tendance émerge clairement: les couples d’âge mûr souhaitent léguer davantage à leur conjoint que ce qui est prévu par la loi.

"Plus de 75% des époux qui modifient leur contrat de mariage ont plus de 50 ans. A cet âge-là, on intègre plus facilement la possibilité d'un décès, on a une image plus claire de sa situation famiilale et de la façon dont on souhaite régler les choses."  Jean Martroye - Notaire


"En particulier dans les familles recomposées, où on a des craintes vis-à-vis d’un enfant ou d’une ‘pièce rapportée’, on souhaite que le conjoint survivant puisse garder la maîtrise de tout, explique Renaud Grégoire. Compte tenu de l’espérance de vie, la perspective de vivre 20 ans seul et de devoir partager tous les avoirs avec les enfants fait réfléchir! On modifie alors le contrat de mariage pour protéger le conjoint survivant. Je suggère dans ce cas de prévoir une attribution totale du logement familial au conjoint survivant. Il ne paiera ainsi aucun droit de succession… tandis que les enfants en paieront davantage. Cette solution résulte de la priorité accordée à la protection du conjoint survivant."


"À l’inverse, on a aussi des cas plus rares de couples qui avaient initialement prévu une forte protection avec une clause ‘au dernier vivant tous les biens’, et qui finalement atténuent cette formule, conscients qu’elle sera pénalisante fiscalement", conclut Renaud Grégoire.